[Témoignage]: la naissance de Jasmin, à la maison

J’écris le récit de ta naissance, Jasmin, avant que le vortex ne se referme et que le tourbillon de la vie nous emmène.

 

***

Nous souhaitions avoir un deuxième enfant, cependant, tu es arrivé sans que je m’y attende vraiment. Petit bébé de la fête, tu as eu en avant-première la cuite avec les copines, les fêtes de Noël, le jour de l’an sur 3 jours, les vacances…

Je sais déjà que je veux accoucher à la maison. Ton frère est né au CHU, et j’ai regretté la poussée dirigée et les déchirures en conséquence, les soins intrusifs sur le bébé, le séjour à la maternité. Pour cette dernière grossesse, je veux m’écouter, me respecter et te respecter.

Je contacte Sophie et Marie par téléphone. On fait un premier rendez-vous pour se rencontrer et voir si tout le monde est partant. Nous partons conquis. Elles sont sensibles et sensées, axées sur la communication et la confiance. Le seul point noir est la route (1h45 aller).

Nous voyons également Hélène régulièrement, notre sage-femme hapto, qui nous avait accompagnée pour Ange.

La grossesse se déroule à merveille, dans mon ressenti elle est très différente de celle de ton frère, qui s’était également parfaitement bien passée. Pour toi mon amour, j’ai mangé des pots et des pots de cornichons, des litres de jus de citrons et des kilos de schtroumpfs. Bon, ça s’est calmé à la fin du premier trimestre.

Je te sens bouger très tôt. Le soir quand Ange vient téter, tu te colles contre lui, mon cœur de maman fond. Ange vient souvent te faire des bisous à travers mon ventre, il te parle et parle de toi, te trouve un doudou…

Le suivi médical est le plus léger possible (3 bilans sanguins, analyses urinaires tous les mois, 3 échographies, test streptocoque B). Rendez vous anesthésiste et ouverture d’un dossier au CHU (à moins de 10 minutes de chez nous) en cas de transfert. Les seuls troubles sont des douleurs à la symphyse pubienne et une carence en magnésium.

Je ne subirais aucun toucher vaginal pendant la grossesse et l’accouchement. Et ça, c’est plus qu’appréciable.

 

***

Avant ta naissance je pensais écrire un récit dans lequel j’aurais repris les différentes phases du vortex. Ces phases qui m’ont beaucoup parlé, que j’ai vécues partiellement pour la naissance de Ange et que je pensais vivre pour toi. Mais toi petit bébé, tu en as décidé autrement, et c’est très bien ainsi.

J’ai travaillé jusqu’à 40+1SA, c’est d’ailleurs après mon dernier rendez-vous de boulot que le pré travail à commencer. Premières contractions le mercredi soir, c’est léger et ça s’arrête le jeudi dans la matinée. Tu bouges toujours beaucoup entre les contractions… à l’image de toute la grossesse !

Ange ne veut pas aller à l’école, on lui promet qu’on viendra le chercher pour qu’il puisse assister à ta naissance.

Le jeudi soir encore quelques contractions. Ange ne veut pas mettre son pyjama. Il dort avec son legging fétiche et une chemise assortie « pour que le bébé [le] trouve beau quand il sortira ».

Vendredi quelques contractions et toujours le col qui travaille.

Dans la nuit de samedi à dimanche, des contractions régulières et rapprochées mais non douloureuse. Perrine, ma jumelle de terme rompt la poche des eaux cette nuit-là.

J’ai jardiné et profité du jardin tout l’après-midi, je pense que ça va te faire venir, toi qui auras un prénom de fleur, que tu sois une fille ou un garçon.

Marie vient le dimanche pour le bel accouchement de Perrine, elle passe nous voir en fin de journée. Nous discutons et ça me fait du bien. Je lâche prise, ce n’est qu’une question de jours, je te fais confiance tu naîtras quand bon te semble, tant pis si je dois aller faire les contrôles au CHU mardi, ça permettra de vérifier que tout va bien. Valentin a proposé de passer la journée avec moi demain. Dans mes insomnies nocturnes, cette nuit-là, je prévois de proposer à ton papa de faire un moulage au plâtre de mon ventre demain. Ça sera chouette.

Lundi 16 septembre 2019,  6h20, ça coule, je sais ce que c’est, je me lève, la poche des eaux est rompue. Je me recouche et profite de la présence de Ange dans notre lit pour lui faire des énormes câlins jusqu’à ce qu’il soit l’heure de se lever pour l’école.

Après le petit déjeuner tous les trois, Valentin emmène Ange à l’école, je mets de la musique, passe un coup de balais, et ne pense plus qu’à toi. Valentin revient et s’installe à table sur son ordinateur du boulot. Je prends le ton le plus aimable possible et lui dit « euh tu fais quoi là ?? ». Allez activation, on installe les affaires pour l’accouchement : matelas au sol dans le séjour, bâches et draps sur le canapé et le lit, radiateur électrique et bouillotte au cas où, alèses jetables à disposition, serviettes de toilettes, gros coussins, couvertures polaires…

10h40 j’envoie un message à Marie pour lui dire que tout est prêt, ça contracte bien, je la préviens quand il faut qu’elle parte.

On fait un rebozo.

Je m’installe sur le ballon au bout de la table à manger, je regarde les deux belles pommes rouges dans le jardin des Patou, au milieu de toutes ces nuances de vert. Je souffle les contractions dans mon bassin qui s’ouvre, mes tissus souples et j’encourage bébé à continuer comme ça. J’alterne quelques contractions debout et sur le ballon. Le liquide amniotique coule encore. Je monte et descends les escaliers pour aller aux toilettes. Il fait beau, on a tiré quelques rideaux pour l’intimité et laissé la vue sur la végétation environnante. La porte fenêtre est ouverte et laisse passer un peu d’air à travers le rideau. C’est un des derniers jours d’été. L’ambiance est sereine. On est tellement bien chez nous !

11h20 Marie me dit qu’elle va partir, elle passe voir Perrine, sauf si besoin elle vient direct.

11h45 euh viens directement en fait…

Nous mangeons, concombre rôti de bœuf, à ma demande ! Je contemple plusieurs fois ma tranche de rôti, à chaque contraction…

12h30 Je dis à Valentin « Marie arrive dans 1h », « bah c’est bon, non ? », « ouais, ouais »

Je rappelle Valentin, j’ai besoin de lui pendant les contractions, il pose sa main dans le bas de mon dos. Je ne peux plus regarder par la fenêtre pendant les contractions (en plus j’ai enlevé mes lunettes alors les pommes sont floues !!), je regarde la nappe et m’accroche à la table, je continue de souffler, je somnole la tête dans les bras entre les contractions.

13h35 Marie est là. J’en pleure de soulagement. Je dis à Valentin d’aller chercher Ange à l’école pour qu’il soit là pour la naissance du bébé comme il l’a demandé. Peut-être 3 contractions après, je lui répète. Il se lève pou y aller. Je dis que ça appuie sur mon périnée. Marie lance un regard sérieux à Valentin, elle lui demande pour combien de temps il en a, il répond « un quart d’heure », je réponds « pas longtemps, dépêche-toi ».

 

Ça s’intensifie, je me lève, toujours appuyée sur la table, mes jambes tremblent. Marie a pris le relais pour le bas de mon dos, elle appuie fort sur deux points, c’est bien. Je perds un peu de sang, je sais que c’est le col qui finit de s’ouvrir, je regarde les gouttes roses sur l’alèse jetable entre mes pieds pendant les contractions. Marie installe rapidement une alèse jetable sur le matelas par terre qui est juste à côté. Elle me propose de prendre appuie sur le ballon. Je me mets à genoux sur l’alèse et l’avant du corps sur le ballon. Rapidement je ne gère plus les contractions, c’est très intense, ça me dépasse, me transcende, je souffle par à-coup, râle, verbalise que ça va vite, trop vite. Marie a des paroles douces, elle me dit que mon bébé est bientôt là. « Ça pousse… et j’ai envie de faire caca », « c’est normal, c’est ton bébé qui arrive ». Je mets ma main, je sens sa tête, « attends bébé s’il te plait, ça va trop vite ». La tête remonte. J’entends la porte et des petits pas tout doux dans l’escalier. C’est bon ils sont là. Valentin vient à côté de moi, Ange se met un peu derrière moi, du côté de Marie, il n’ose pas s’approcher. Je grogne, râle, crie un peu, dis que ça brûle. J’entends ma chienne qui gémit derrière moi, la coquine est à la porte fenêtre restée ouverte ! Et puis je pousse, c’est mon bébé qui en a besoin pour l’aider à sortir. Je suis sur un genou et un pied. Je sens mon périnée qui s’étire sur la tête du bébé, et je  sens les derniers petits coups de pieds in utero. Deux poussées je crois, la tête sort et tout le corps d’un seul coup, le bonheur, c’est un garçon, « le bébé est là ! » tout chaud et un peu gluant dans mes mains, entre mes cuisses. Il est 14h14. Marie enlève rapidement le tour de cordon autour du cou. Je demande à ce qu’on m’enlève ma robe et mon soutien-gorge et je te mets, Jasmin, contre mon cœur.

 

***

On s’installe ensuite sur le matelas, c’est fou et indescriptible.

On câline, Marie est très discrète, elle fait la paperasse. Jasmin sera juste pesé et ausculté. Je prends de l’homéopathie pour les tranchées.

Le placenta sortira 1h après la naissance environ, après quelques contractions très douloureuses, pendant lesquelles Ange me dit « tu vas encore crier maman ? », je me redresse à genoux, Jasmin au sein, et le placenta glisse tout seul.

Il est dans la poche, Marie nous fait un petit cours d’anatomie. Après avoir coupé le cordon, Marie aidera Valentin (et un peu Ange) à faire les empreintes, et puis direction le congélateur, on le plantera sous un arbre dans le jardin.

On grignote des gâteaux et du jus d’oranges pressées.

 

***

Marie vient le lendemain, on discute, elle me fait avec Valentin un serrage du bassin, qui me fait beaucoup de bien.

Sur les conseils de Marie, on raconte la chronologie de la grossesse à Jasmin.

 

A J2 une sage-femme « locale » vient faire le Guthrie et une auscultation du bébé. Je refuse qu’elle regarde mon périnée car je sais qu’il n’y rien que des éraillures et je ne ressens pas le besoin de faire vérifier. Je suis fière d’oser dire non !

A J3, la montée de lait arrive. Je refuse la visite de la SF qui souhaite venir vérifier le lendemain la prise de poids de Jasmin. Je sais que tout va bien, mon bébé est magnifique et en pleine forme, alors la pesée attendra la visite chez le pédiatre à J8.

AJ4, je finis mon paquet de couches jetables pour adulte !!! Et j’écris ce récit, les seins à l’air, d’une seule main, l’autre tenant mon tout petit contre moi.

Demain nous aurons les premières visites de nos familles et nous reviendrons peu à peu à la réalité. Je suis contente d’avoir osé prendre ce temps, pour moi, pour toi, pour notre famille et son nouvel équilibre, encore fragile.

Pour la suite du post partum, nous ferons le bain dérivatif, nous verrons Hélène pour faire de l’haptonomie et je souhaite m’offrir un véritable soin rebozo…

 

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Lire des récits de naissances respectées m’a beaucoup inspiré et donné confiance, alors j’espère que mon récit pourra procurer les mêmes bénéfices.

 

jasmin.png
source : @hey_minoe
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Un commentaire sur « [Témoignage]: la naissance de Jasmin, à la maison »

  1. J’espère qu’elle a eu l’occasion de prendre soin d’elle comme prévu.
    Deux ans en arrière, j’aurais fait bien des choses pour prendre soin de moi pendant le post=partum avec les connaissances que j’ai acquise: bandage du bassin et rebozo en premier!

    Le bain dérivatif.. je dois m’y mettre mais je ne me lance pas!

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