Lorsque l’on parle de naissance, il est essentiel de se rappeler de quelle nature nous sommes.
Nous sommes des MAMMIFÈRES et nous, femmes, sommes censées accoucher comme le font tous les autres mammifères, c’est à dire dans le respect de la nature, de la physiologie et de tous nos besoins.
Qu’est ce que tout cela signifie ?
Accoucher de façon « naturelle » ne signifie pas que l’accouchement est forcément « physiologique ». Cependant, un accouchement physiologique est par définition naturel. Ce sont donc deux termes bien différents qu’il est essentiel de distinguer. En réalité, chacun a sa définition du « naturel ». Dans beaucoup d’esprits, accoucher naturellement signifie juste « sans péridurale ». Mais qu’en est-il de toutes les autres interventions médicales (injection d’ocytocine de synthèse, épisiotomie, forceps, ventouse, …), ne sont-elles pas justement contre nature ? Et qu’en est-il du respect de la physiologie et des besoins de la mère et du bébé?
Définition de la physiologie
Le mot physiologie (du grec phusis, la nature, et logos, l’étude et la science) est la « science qui étudie les fonctions normales des organes et des tissus des êtres vivants. » (Le petit Robert).
D’après Maïtie Trélaun (2012), « la physiologie appliquée à l’obstétrique étudie les mécanismes physiques et chimiques fondamentaux de l’organisme permettant la reproduction, la gestation, l’enfantement et l’allaitement dans un contexte universel et transculturel. Donc l’étude de la physiologie en général, et de l’accouchement en particulier, est une science qui identifie les mécanismes fondamentaux de l’organisme tant physiques (mobilité du bassin, actions et interactions des muscles, rotation de mobile fœtal), que chimiques (les hormones, leurs actions physiques et comportementales, leur interactions…) permettant l’enfantement. ». Si vous souhaitez en apprendre plus sur les transformations corporelles durant le processus d’accouchement, je vous invite à lire cet article. Pour connaître les différentes hormones clés de la naissance, je vous recommande cet article.
Ainsi, par accouchement »naturel » et « physiologique », nous pouvons aussi entendre:
- par voie basse,
- dans la période du terme (37 à 42 SA),
- sans aucune intervention médicale venant perturber les mécanismes physiques, chimiques et j’ajouterai même psychiques, de l’organisme, telle que : le déclenchement ; la péridurale ; l’ocytocine de synthèse ; l’emploi d’instruments d’extraction tels que les forceps, les ventouses ; l’épisiotomie ; la poussée dirigée ; la césarienne ; les touchers vaginaux répétés ; le monitoring continu ; l’expression abdominale du placenta ; le clampage du cordon précoce ; ….
- le respect de tous les besoins de la femme qui enfante et de son bébé
Pour en savoir plus sur ces pratiques hospitalières beaucoup trop courantes, je vous invite à lire mes deux articles sur le sujet ici et là.
Pour comprendre la physiologie, il est essentiel de savoir que l’accouchement est un acte spontané. D’après Ruth Ehrhardt (2015), sage-femme sud-africaine, entrer en travail est similaire au tomber dans le sommeil : les deux états ne peuvent pas être forcés ! Ce sont deux actes involontaires. Ils arrivent naturellement et parfois quand on l’attend le moins. On ne peut pas décider quand s’endormir ni quand entrer en travail d’accouchement. Par contre, on peut rendre difficile pour chacun de se dérouler facilement et efficacement. Le travail d’accouchement est comme le sommeil car nous avons besoin des mêmes conditions pour entrer dans ces deux états : nous avons besoin de nous sentir en sécurité, de chaleur, de relaxation. Nous avons besoin d’être dans un environnement confortable, libre de toute pression, anxiété ou peur.
Nous allons à présent voir que le respect de la physiologie commence dès la grossesse. Nous allons ensuite détailler les grands besoins de la femme qui enfante dont dépend tout le processus physiologique. Je vous expliquerai aussi en quoi le post-partum fait également partie de la physiologie.
La physiologie dès la grossesse
Il y a deux manières d’appréhender la grossesse et l’accouchement.
D’abord, on retrouve l’accompagnement physiologique qui est l’héritage de la sage-femme traditionnelle et de la médecine humaniste (Gaskin, 2012). Puis, il y a l’accompagnement technico-médical, le plus fréquent en France.
L’accompagnement physiologique
L’approche physiologique est centrée sur la femme qui va accoucher et non pas celle qui se fait accoucher. Ce type d’accompagnement reconnaît « l’étroite connexion qui existe entre le corps et l’esprit, et le pouvoir des femmes à donner la vie » (Gaskin, 2012). La grossesse et l’accouchement sont perçus comme un processus naturel, sain, normal de la vie d’une femme. On prend en compte les émotions de la mère comme ayant un fort impact sur le bien-être du bébé et sur le processus physiologique.
« Lorsque les besoins affectifs de la mère sont satisfaits, les risques sont moindres pour l’enfant » (Gaskin, 2012).
En général le suivi périnatal d’un accompagnement physiologique est composé de visites beaucoup plus longues et qualitatives (atmosphère chaleureuse et douce), qui répondent mieux aux attentes et besoins des femmes (réassurance, sécurité, confiance, lien affectif, sérénité, compréhension, écoute, etc.) qu’un suivi technico-médical (généralement rapide, froid, mécanique, intrusif, parfois stressant et inquiétant).
L’accompagnement physiologique se fait généralement par une sage-femme (ce peut être aussi un sage-femme, bien sûr).
Attention : ce statut ne garantit pas que la personne soit formée à la physiologie, c’est à vérifier avant la prise de rendez-vous.
Une sage-femme n’ayant connu que l’hôpital, est le plus souvent non formée à la physiologie contrairement à une sage-femme exerçant en maison de naissance, ou en libéral (suivi d’accouchements à domicile, notamment). Ainsi, cette spécialiste de la grossesse et de l’accouchement normal sait reconnaître les besoins de la femme, notamment ceux d’empathie et de réassurance.
Pendant la grossesse, l’emploi d’outils, de matériel médical ne se fait qu’en cas d’extrême nécessité. Les échographies peuvent être limitées aux trois seules recommandées. Le test de diabète gestationnel peut être réalisé uniquement en cas de présence de facteurs de risques. Il en est de même pour les touchers vaginaux : à moins que la sage-femme ait un doute quant à la normalité du déroulement de la grossesse, les touchers vaginaux sont absents. Si celle-ci soupçonne une anomalie, elle peut alors effectuer un toucher vaginal. Elle vous redirigera alors chez un(e) obstétricien(ne) (étant spécialiste des pathologies) si elle estime que cela est nécessaire.
« Dans la prise en charge physiologique de la grossesse un geste médical est considéré comme inapproprié à moins d’être réellement nécessaire » (Gaskin, 2012)
Lors d’un accompagnement physiologique, le jour de l’accouchement, le travail suit son rythme propre, sans qu’il s’inscrive dans une durée prédéterminée : il peut se déclencher, puis s’interrompre, accélérer, ralentir, sans que cela relève de l’anormalité.
D’après la recherche, lorsque l’accompagnement physiologique est suivi, entre 85% et 95% des grossesses normales (à bas risque) se concluent par un accouchement sans intervention médicale (chirurgie, emploi d’outils comme les forceps, etc.) (Gaskin, 2012).
L’accompagnement physiologique reconnaît bien sûr ses limites et la nécessité d’intervenir médicalement dans une minorité de cas.
L’accompagnement technico-médical
D’après Ina May Gaskin (2012), l’accompagnement technico-médical a été construit par la gente masculine depuis à peine deux siècles. Pour ce suivi, le corps humain est perçu comme une machine défaillante (en particulier celui de la femme). La grossesse et l’accouchement sont perçus comme une maladie, une pathologie, qui doit absolument être prise en charge médicalement pour ne pas être dommageable pour l’enfant et la mère. Pour ce modèle, des interventions médicales sont jugées nécessaires pour tous les accouchements (même non pathologiques donc). C’est ainsi que tous les gynécologues et hôpitaux ont chacun leur protocole rigide à respecter quelque soit le déroulement de la grossesse (touchers vaginaux systématiques, suivi médical mensuel, échographies à répétition, test du diabète gestationnel, contrôle du poids, etc.) et le déroulement de l’accouchement (temps à respecter, dilatation d’un centimètre par heure, déclenchement, monitoring continu, épisiotomie, ocytocine de synthèse…). La prise en charge des naissances y est donc standardisée, dans une logique fordiste :
« Le protocole qu’on leur impose (aux femmes) n’est pas du tout prévu pour les sauver ou les protéger, mais pour que l’hôpital tourne le plus vite possible. Il s’agit d’une logique fordiste : les femmes doivent accoucher à la chaîne, avec des sages-femmes qui courent d’une salle à l’autre, en accélérant le travail ici, et en le ralentissant ailleurs… Il n’y a pas d’accompagnement humain, ni de prise en compte des souhaits individuels, mais des normes déconnectées de la réalité physiologique de l’accouchement. Parmi ces normes : le dogme selon lequel le col de l’utérus doit s’ouvrir d’un centimètre par heure. Pour contrôler ce rythme, totalement arbitraire, on impose aux femmes des touchers vaginaux réguliers, c’est à dire qu’on leur enfonce deux doigts très profondément dans le vagin pour mesure l’ouverture du col. Ce peut être une personne différente à chaque fois […] ». Marie-Hélène Lahaye, interviewée dans cet article.)
Le corps et l’esprit sont considérés séparés. Les émotions et ressentis de la femme ne sont pas pris en compte.
Ensuite, pour accoucher dans un contexte technico-médical, la femme est dans la plupart des cas allongée sur le dos, branchée à un monitoring, une perfusion au bras, avec interdiction de manger ou boire. La douleur du travail est considérée comme inacceptable, il est donc souvent systématiquement proposé à la femme de prendre la péridurale. Globalement, les professionnels croient assez peu aux capacités d’une femme à mettre au monde son bébé sans anesthésie. L’accouchement est aussi beaucoup plus facile pour eux lorsque la femme reste immobile sous anesthésie.
La femme est donc le plus souvent passive, considérée comme un objet à manipuler, et représentant un obstacle potentiel à l’arrivée du bébé (si son corps ne va pas au rythme attendu, ou si elle ne reste pas tranquille à suivre les protocoles, par exemple) (Gaskin, 2012). La femme n’est pas prise en compte dans son individualité, sa subjectivité et sa personne.
Evidemment, ce n’est pas aussi extrême pour toutes les prises en charge. Certains gynécologues s’ouvrent au respect de la physiologie (même s’ils sont plutôt rares), et il en est de même de certains hôpitaux dotés notamment d’une salle nature ou d’un plateau technique.
Attention : la présence d’une telle salle ne veut absolument pas dire que le protocole de prise en charge proposé sera forcément en faveur de la physiologie. Les protocoles en place sont à vérifier en amont.
La préparation à l’accouchement : vraiment nécessaire ?
Dès la grossesse, il persiste la forte croyance qu’une femme doit être « préparée » avec des cours de préparation à l’accouchement. Ces cours ont pour objectifs « non seulement d’apprendre aux futures mères les bons comportements vis à vis du fœtus, mais aussi de les préparer à être de bonnes patientes » (B. Jacques, 2007), c’est à dire des patientes « dociles » qui suivront les protocoles hospitaliers. Pour Michel Odent (2012), les cours de préparation à la naissance sont le propre de l’ère électronique dans laquelle on croit que la femme doit apprendre à accoucher de la même façon qu’on apprend à parler ou à lire. Mais l’accouchement est un processus involontaire qui mobilise les structures anciennes du cerveau primitif et mammalien. On ne peut pas aider une femme à accoucher.
« On ne peut pas aider un processus involontaire ; on peut seulement éviter de trop le perturber ». Michel Odent, 2012
Or, se préparer à accoucher à l’aide de divers techniques et outils à employer le jour J empêche la femme de se connecter au cerveau archaïque car cela mobilise son néocortex, siège de la raison, du langage et du contrôle. Cela l’empêche de lâcher prise entièrement et de se laisser aller à l’animal en elle. Vous allez comprendre dans la suite de cet article qu’une femme a besoin « d’éteindre » toute activité du néo cortex pour laisser faire la physiologie et entrer dans sa bulle.
Alors quels besoins de base doivent être respectés pour qu’une femme puisse accoucher physiologiquement et naturellement ?
Respecter la physiologie : les grands besoins de la femme qui accouche
Pour que la physiologie de la naissance puisse se dérouler normalement, il est indispensable que les besoins de la femme en travail soient respectés. S’ils ne le sont pas, cela vient « casser » le processus physiologique et entraîner des complications : travail beaucoup plus long, contractions peu efficaces, douleur beaucoup plus forte voire insupportable, pas de progression du bébé, nécessité de médicaliser l’accouchement par différentes interventions.
Il est important de comprendre que l’accouchement est un acte spontané, comme l’acte de s’endormir ou la digestion. Pour ne pas que cet acte soit cassé dans sa spontanéité, je vous propose la liste de 6 grands besoins de base de la femme qui accouche. Je me base sur les travaux de différents auteurs et sur mes réflexions et expériences personnelles.
1.Le besoin d’un environnement intime, sécure, et sombre – ou le respect de la loi des sphincters
Intimité, chaleur, obscurité
Michel Odent, obstétricien français, met l’accent sur le besoin primordial d’intimité pour accoucher, présent chez tous les mammifères. Le mot « intimité » signifie « ce que l’on ressent quand nous ne sommes pas observés« , ou « que l’on ne se sait pas observés » (M. Odent, 1990). L’intimité c’est ce qui est gardé pour soi, ce qui est privé, personnel et coupé du monde extérieur et des étrangers. Ce peut être le « confort d’un endroit où l’on se sent tout à fait chez soi, isolé du monde extérieur » (M. Odent, 1990).
Pour les animaux, la question du respect de l’intimité est simple : ils vont se cacher et s’isoler pour faire naître leur petit. C’est également le cas pour beaucoup de peuples à travers le monde. Michel Odent parle des Eipos de Nouvelle-Guinée, chez qui la future mère s’isole dans les buissons pour y mettre au monde son bébé. D’après ce pionnier de l’accouchement respecté, « dans toutes les sociétés où les femmes ont l’habitude de s’isoler pour accoucher, l’accouchement semble y avoir la réputation d’être facile » (M. Odent, 1990). Il ajoute que le désordre renforce le sentiment d’intimité. Or dans les maternités, tout est parfaitement en ordre : net, lisse, bien rangé, voire froid. Comment alors se sentir comme chez soi? Il est aussi important que la femme n’ait pas froid, pour être à l’aise et se détendre. Le froid crispe, tend et donc peut venir empêcher le lâcher prise par l’inconfort qu’il amène.
De plus, la plupart des femelles mammifères cherchent un coin sombre pour donner la vie afin de ne pas se sentir observées. D’après Michel Odent (1990), l’obscurité pourrait être encore plus essentielle lors des naissances chez l’humain que chez tous les autres mammifères. En effet, l’humain a le néocortex beaucoup plus développé que tous les autres animaux, siège de la raison, du langage et de l’intellect. Pendant un accouchement, c’est la partie primitive du cerveau qui doit être active, et le néocortex doit alors « s’effacer ». Le corps sécrète alors toutes les hormones propices à la naissance, et l’activité du nouveau cerveau se réduit. C’est grâce à ce processus que les femmes qui accouchent de façon physiologique, avec tous leurs besoins respectés, se coupent alors du monde en entrant dans une bulle. La femme peut réellement changer d’état de conscience, ce qui la protège de tous les stimuli (comme de la douleur) et participe à la production hormonale. Malheureusement, dans les maternités il est classique de se trouver dans une salle à la lumière vive, et de voir différents professionnels interagir avec la future mère, en lui posant des questions, en interagissant avec elle et en l’observant. Ces perturbations viennent faire rupture avec toute la physiologie de l’accouchement en réactivant le néocortex, en dérangeant la femme dans son besoin de repli sur elle, et dans son besoin d’intimité. D’après Odent (1990), la vue « est le plus intellectuel de nos sens », c’est pourquoi il est essentiel de demander à être dans une pièce à la lumière tamisée, en plus de ne pas être dérangée, sur un projet de naissance.
Intimité et loi des sphincters
Ina May Gaskin, sage-femme américaine reconnue mondialement pour son approche physiologique de l’accouchement, a développé la fameuse Loi des sphincters (Gaskin, 2012). Connaître les principes de cette loi peut réellement transformer toute notre vision de l’accouchement, mais aussi notre perception du fonctionnement du corps de la femme qui accouche.
Voici les principes de cette loi :
- « Les sphincters cervical, vaginal et excrétoire (du col de l’utérus, de la vessie et du rectum) fonctionnent avec une plus grande efficacité dans une atmosphère d’intimité et de pudeur – par exemple, une salle de bains munie d’un verrou ou une chambre où une interruption est impossible ». Avez-vous déjà essayé de faire caca chez des amis et en plus la porte ouverte ? Hummm impossible pour la plupart d’entre nous, n’est-ce-pas ? Et bien il en est de même pour l’accouchement !
- « Les sphincters ne peuvent pas s’ouvrir par la seule volonté et n’obéissent pas aux ordres (tels que Pousse ! ou Relâche !) » : ces ordres tellement fréquents à l’hôpital, sont donnés dans l’ignorance (ou surtout quand il y a un protocole rigide à respecter : pas plus de X heures pour accoucher) que la mère saura ELLE quand pousser grâce au merveilleux et puissant réflexe de poussée.
- « Quand un sphincter est en train de s’ouvrir, il peut se refermer brusquement si la personne en question est contrariée, effrayée, humiliée ou gênée. Pourquoi? (Par ce qu’)un taux élevé d’adrénaline dans le sang ne favorise pas (parfois même entrave réellement) l’ouverture du sphincter. Ce facteur inhibant est vécu par tous les mammifères lors d’un danger et d’une menace : le processus d’accouchement, s’arrête voire régresse pour permettre au mammifère de fuir afin de trouver un nouvel endroit plus sécurisé pour mettre bas. »
- « L’état de relaxation de la bouche et des mâchoires est en corrélation directe avec la capacité des sphincters cervical, vaginal et anal à arriver à dilatation complète ». Laissez votre bouche et votre gorge souples, ne les crisper pas pendant l’accouchement. Les femmes détendues au niveau de la gorge et de la bouche n’ont généralement pas de déchirure.
- « Le rire facilite l’ouverture des sphincters » : éclater de rire quand on accouche est pour Gaskin une des formes d’anesthésie les plus efficaces car cela libère des endorphines, antidouleur puissant.
- « Une respiration lente et profonde abdominale facilite l’ouverture des sphincters ». Elle induit une relaxation générale et plus particulièrement du plancher pelvien.
- « Prendre un bain chaud, ou une douche a un effet calmant et détend les sphincters ».
Enfin, le besoin d’intimité se poursuit une fois le bébé né. Le contexte intime de la rencontre entre une maman et son bébé est plus que nécessaire pour que la physiologie se poursuive avec notamment la première tétée, une succion efficace, le décollement du placenta et son expulsion.
2.Le besoin de se trouver dans un lieu familier
Niles Newton, Docteur en psychologie américaine a étudié l’impact de l’environnement sur la naissance des mammifères (M. Odent, 1990). Elle a analysé les facteurs pouvant rendre les accouchement plus longs, difficiles et dangereux chez les souris. L’un des facteurs majeurs impactant le processus physiologique de l’accouchement est le placement de l’animal dans un lieu inconnu et non familier. Un autre facteur est le déplacement de la future mère d’un endroit à un autre pendant l’accouchement (comme pour partir de chez soi pour aller à la maternité, ou changer de salle à la maternité). Michel Odent confirme que toutes les conclusions de Niles Newton sur les effets de l’environnement sont transposables à l’humain. Pour ce médecin, nous sommes des mammifères et avons les mêmes besoins que tous les autres mammifères :
« Il faut rattraper le temps perdu par l’obsession des différentes. Nous ne devons pas avoir honte d’admettre que les autres mammifères peuvent nous aider à redécouvrir ce que nous avons oublié » (M. Odent, 1990).
Pour répondre à ce besoin de lieu familier, il est possible de faire le choix d’accoucher en maison de naissance, à domicile, ou dans une maternité proposant une salle nature, ou proposant au moins de venir visiter les lieux autant de fois que la femme le souhaite. Elle peut aussi indiquer sur son projet de naissance qu’elle ne souhaite pas changer de lieu, mais qu’elle tient à rester dans la même salle pour ne pas perturber le travail (vérifier en amont auprès de la maternité que cela sera bien accepté). En choisissant d’accoucher à domicile, avec une sage-femme expérimentée et certifiée, cette problématique de changement d’environnement n’existe pas. L’intimité y est totale puisqu’on se trouve dans notre propre cocon familier. C’est clairement le lieu le plus physiologique possible pour donner naissance.
3.Le besoin de respect de « La bulle »- ou respecter le changement d’état de conscience de la mère
Quand une femme accouche librement dans le respect de tous ses besoins, il se passe alors un phénomène unique. Elle entre littéralement dans une bulle, comme si elle partait sur une autre planète. La femme se coupe du monde, change d’état de conscience. Ce phénomène s’explique par la réduction de l’activité cérébrale du néo cortex, siège de la raison et du langage, et responsable de toutes les inhibitions du cortex archaïque qui causeront alors un accouchement beaucoup plus long, douloureux, voire dangereux. Quand le nouveau cortex est actif pendant l’accouchement, il gêne l’activité de l’ancien cerveau.
Quand on accouche comme tout mammifère (dans l’intimité, spontanément, sans dérangement, avec tous nos besoins assouvis), le cerveau « archaïque » prend alors les commandes. Ce cerveau primitif, que nous partageons avec tous les mammifères, est en lien aux systèmes hormonal et immunitaire. Ce cerveau est comme une glande qui sécrète les hormones nécessaires au processus d’accouchement, c’est à dire les hormones responsables des contractions utérines, et celles protectrices de la douleur (M. Odent, 1990) : l’ocytocine et les endorphines.
Lorsque la femme déconnecte, entre dans sa bulle, elle est libérée de toute inhibition. Elle se lâche, crie autant qu’elle en a besoin, ouvre ses sphincters en oubliant tout ce qui a été appris, tout intellect, tout ce qui est culturel. Elle devient animale. La physiologie est totale.
Lorsqu’une femme accouche à l’hôpital, le respect de la bulle est le plus souvent mis à mal à cause des protocoles médicaux systématiques et de l’environnement inadapté. Mais, en construisant un projet de naissance, il est possible de demander à ce que la physiologie et les besoins soient le plus possible respectés. Par exemple, s’il y a un besoin de toucher vaginal, que cela soit à l’hôpital ou à domicile, il est préférable de ne pas partager à la femme les détails de la dilatation et de la position du bébé. Cela dérange la femme, la sort de sa bulle (cortex archaïque), la remet dans l’intellect et la raison (néocortex), et peut la stresser énormément. Il est donc possible de demander sur le projet de naissance à avoir le moins de touchers vaginaux possibles, et à ne pas connaître le stade de dilatation durant le travail. Il en est de même pour toutes les autres intrusions et dérangements possibles. Si vous souhaitez découvrir un exemple de projet de naissance pour un accouchement à l’hôpital respecté, en voici un ici.
Le respect du besoin d’intimité et de tranquillité de la femme en travail est donc primordial pour laisser à la femme l’espace d’entrer dans cette bulle, dans cet état de conscience modifié, dans cet état animal.
4.Le besoin de liberté pour répondre à ses besoins corporels
La femme qui enfante a aussi besoin de liberté pour répondre à tous ses besoins corporels, comme avant tout de pouvoir boire et manger autant qu’elle en exprime le besoin. Accoucher nécessite de mobiliser énormément d’énergie. Il est donc normal d’avoir besoin de s’alimenter et de s’hydrater. Vous pouvez imaginer parcourir un triathlon sans pouvoir boire une goutte d’eau ? Impossible de le faire de manière efficace. Ina May Gaskin conseille de boire beaucoup pendant le travail et d’aller aux toilettes dès que le besoin s’en fait sentir : cela vous prémunira contre la déshydratation, et uriner stimulera le réflexe de détente des muscles pelviens quand vous vous asseyiez aux toilettes, augmentera la pression contre le col de l’utérus et facilitera la descente du bébé (Gaskin, 2012).
Michel Odent, relate que la femme qui accouche a besoin d’un lit bas et confortable pour faciliter la liberté de mouvement et se sentir pleinement à l’aise. Il est indispensable de respecter le besoin de bouger et de changer de position pendant le travail. C’est comme ça que le col s’ouvrira naturellement et que bébé descendra dans le bassin en étant bien positionné. Dans les sociétés traditionnelles, les femmes adoptent presque toujours une position verticale pendant le travail (Gaskin, 2012). Les positions verticales ont différents bénéfices : comme une utilisation de la pesanteur pour la descente du bébé, une optimisation des échanges sanguins entre la mère et l’enfant, un meilleur alignement du bébé pour franchir la filière pelvienne, un renforcement de la puissance des contractions, une augmentation de la taille du pelvis en position agenouillée ou accroupie (Gaskin, 2012).
La pratique de l’accouchement en position gynécologique, c’est à dire sur le dos, pieds dans les étriers, remonte au 17e siècle. Cette recommandation a été faite pour le bénéfice du médecin ou de « l’accoucheur » afin de pouvoir voir/contrôler les choses au mieux et en cas de besoin d’utiliser les forceps. Cette pratique est rapidement devenue la norme avec l’arrivée des anesthésiants autour du 19e siècle. L’accouchement accroupie ou debout était en plus vu comme une pratique primaire et animale.
Pour Gaskin (2012), c’est évidemment tout l’inverse que la femme requiert. Cette grande sage-femme recommande même ceci aux femmes : « laissez faire la primate en vous« , en ne laissant pas le mental hyperactif interférer avec « la sagesse ancestrale de votre corps« . Elle propose même de se comparer aux guenons, qui elles, contrairement aux femmes :
- ne pensent pas qu’il est indispensable de recourir à la technologie pour accoucher,
- ne passent pas leur temps à penser que leur corps n’est pas bien conçu,
- ne font pas de calculs savants pour essayer de deviner combien de temps l’accouchement va encore durer,
- adoptent la position qui leur convient à elles,
- ne sont pas gênées à l’idée de faire du bruit ou de déféquer pendant le travail…(Gaskin, 2012).
Gaskin ajoute qu’il faut même apprendre à aimer cette primate en soi, ou tout autre grand mammifère de notre choix avec lequel s’identifier.
Ainsi, pour accoucher sans difficulté, la femme doit retrouver l’animal sauvage qui sommeille en elle, et se laisser libre d’agir selon l’instinct : bouger, crier, chanter, danser, rire, embrasser, enlacer, …
5.Le besoin de confiance, sérénité et relaxation
Comme vous l’aurez compris au travers de la Loi des sphincters, pour Ina May Gaskin (2012), « s’il existe un processus physiologique qui requiert un état de relaxation maximum, c’est bien l’accouchement« .
Le stress est un inhibiteur du cortex archaïque et activera de façon importante le néocortex en vous replaçant dans la parole, l’intellect, les ruminations plutôt que dans « l’agir animal et instinctif ». Il est essentiel de parvenir à calmer son esprit, à se relaxer et à entrer dans un état de sérénité intérieure et de confiance, et cela dès la grossesse.
Comme nous sommes des mammifères, mais aussi des êtres humains au cerveau plus développé que les autres animaux, la physiologie de la naissance est pour moi indissociable de la psychologie.
Notre état mental impacte directement notre organisme.
Nous portons tous en nous des représentations, des croyances (souvent négatives) sur la naissance, conscientes ou non. Elles sont véhiculées par la société, la famille, les proches, les médias, le corps médical, etc. Ces croyances plus ou moins profondes peuvent venir perturber tout notre vécu de la grossesse et de la naissance. Elles peuvent entraîner des pensées automatiques, des distorsions cognitives, des émotions de toutes sortes, etc. qui pourront affecter les processus physiologiques.
Beaucoup d’études en psychologie (Dockray, S. & Steptoe, A., 2010 ; Steptoe, A. & Wardle, J., 2005) ont montré que les taux de cortisol et d’adrénaline étaient beaucoup plus bas chez les personnes à l’humeur positive et optimiste et que celles-ci étaient en meilleure santé sur le long terme avec une activation plus faible des systèmes psychobiologiques neuroendocrinien, autonome, immunitaire et inflammatoire.
D’autres études (Vitetta et al., 2005) ont découvert que le contrôle et la suppression du stress est très important dans l’amélioration de la qualité de vie et dans la prévention de pathologies. Il a même été démontré que lors de stress intense, voire de trauma, l’induction de pensées positives entraîne une meilleure réadaptation de l’organisme chez les personnes en ayant une action direct sur le système cardiovasculaire via l’action du système parasympathique. L’optimisme a donc un réel effet sur la santé cardiaque, les hormones, le système immunitaire, la santé mentale, et entraîne une meilleure récupération après une maladie ou un accident. (Tugade et al, 2004).
Vous devinez qu’il en sera de même pour l’expérience de la grossesse et de l’accouchement. Plus la femme va employer un langage positif et se concentrera sur ses ressentis et émotions positives, plus cela entraînera de sérénité et de bien-être pour vivre l’expérience de la naissance.
Aussi, les croyances, les représentations, les pensées que l’on a sur notre état de santé, et les émotions qui en découlent, impactent directement notre expérience et notre interprétation de celle-ci (Salovey et al., 2000). Par exemple, si lors de son accouchement, la femme se trouve dans un état de stress, d’anxiété, de pensées négatives, elle aura alors tendance à interpréter la douleur et les ressentis très négativement, ce qui pourra affecter les processus physiologiques (douleur plus vive, travail inefficace…) et pourra alors entraîner une médicalisation. Si la femme ressent des émotions positives, qu’elle se sent sereine, et que l’environnement est adapté, les processus physiologiques seront respectés pleinement.
Les émotions positives sont de vraies antidotes aux émotions négatives puisqu’elles vont même jusqu’à les supprimer
(Fredrickson, 2001).
Attention ! Cela ne signifie pas qu’il faut refouler ou ignorer toutes les peurs, angoisses, traumas passés, émotions négatives, souffrances, etc. Si le stress et l’angoisse sont importants et vont jusqu’à altérer la qualité de vie, il est essentiel d’entreprendre une prise en charge auprès d’un psychologue afin d’élaborer et de donner sens à ce vécu.
De plus, il arrive parfois, malgré un état d’esprit positif et un environnement adapté lors de la naissance, que la médicalisation soit quand même nécessaire (moins de 10% des accouchements ont besoin d’être médicalisés). Dans ces cas là aussi, garder un état d’esprit positif, employer des techniques d’actualisation du positif (image mentale, visualisation, respirations, affirmations positives, etc.) peut grandement aider à vivre son accouchement sereinement malgré le contexte difficile. Cela peut aussi éviter une aggravation de la situation.
Pour parvenir à cet état de sérénité, de paix, de confiance intérieure, la psychologie et la sophrologie (notamment) peuvent offrir de nombreux outils : des respirations, des visualisations, des affirmations positives, la lecture de témoignages positifs d’accouchement, un travail cognitivo-comportemental pendant la grossesse pour prendre conscience de nos croyances et représentations négatives sur l’accouchement et s’en libérer, un travail psychologique au niveau transgénérationnel afin de prendre conscience de croyances, d’affects et d’émotions bloquées pouvant impacter notre vécu durant l’accouchement, un accompagnement psychologique en cas de traumatisme passé, un travail plus général sur nos cognitions afin de rendre nos pensées et notre état d’esprit plus positif, etc.
6.Le besoin d’être entourée de personnes familières, BIENVEILLANTES, sereines et soutenantes
Il suffit d’une personne qui nous dérange, pour que le travail ne soit plus efficace (Gaskin, 2012).
Vous l’aurez compris, il est important de créer un environnement qui soit le plus familier et serein possible pour que la physiologie de l’accouchement puisse s’exercer librement et naturellement. Cela passe donc par le choix des personnes accompagnant la femme pour son accouchement.
Quand cela est possible, il est préférable de choisir des personnes avec qui la femme enceinte est pleinement à l’aise et en confiance. C’est essentiel que les personnes accompagnant la naissance soient capables de rester sereines et calmes, mais aussi d’encourager, de soutenir, de rassurer. Selon moi, choisir une sage-femme qui suivra toute la grossesse et qui sera présente le jour de l’accouchement est un facteur clé pour que la physiologie puisse se dérouler normalement et efficacement. Lorsqu’une femme, un couple, opte pour un suivi physiologique avec une sage-femme, ils apprennent à la connaître au fil des mois, et il se développe souvent une complicité très forte, une vraie relation de confiance, importante pour le jour de la naissance. La femme est pleinement rassurée, se sent sécurisée, en terrain connu et peut réellement se laisser aller en profondeur le jour J. Le conjoint également.
Malheureusement, quand on accouche à la maternité, ce n’est généralement pas possible de choisir sa sage-femme. Si cela est important pour la femme/le couple, en choisissant d’accoucher en maison de naissance, en plateau technique ou à la maison, ils auront normalement cette possibilité. Pour en savoir plus sur les différents lieux possibles d’accouchement, je vous invite à lire cet article.
Il est aussi possible d’opter pour le soutien d’une doula. Une doula est en général une mère ayant elle-même expérimenté la naissance. Elle apporte un soutien moral et pratique à une femme enceinte ou un couple dès la grossesse, durant l’accouchement et en post-partum. Son travail consiste à rendre le moment de la naissance plus confortable et à rassurer le couple (Gaskin, 2012). D’après la recherche (citée par Gaskin, 2012), à défaut d’avoir pu choisir sa sage-femme, la présence d’une doula divise par deux le risque d’avoir une césarienne inutile et de subir une extraction instrumentale. Cet accompagnement réduit fortement le temps de travail par le fait que le stress, la douleur et l’anxiété sont grandement diminués. Le père ayant parfois des peurs, des angoisses et des inquiétudes, la présence de la doula pourra grandement le rassurer.
Attention : certaines maternités en France n’acceptent pas les doulas. Il est important de se renseigner à l’avance et d’en discuter avec les professionnels de l’hôpital.
Etre entourée de personnes rassurantes, bienveillantes, maternantes est également en lien à une perception réduite de la douleur, de par la forte sécrétion d’endorphines que ces conditions engendrent (Gaskin, 2012). Pour en savoir plus sur les multiples facettes de la douleur de l’accouchement, je vous invite à lire cet article. Lorsque la femme est entourée de personnes qui savent la rassurer et la mettre en confiance, « au lieu d’avoir peur de son corps, elle lui accorde sa confiance » , elle « acquiert une compréhension nouvelle de la sagesse de la nature telle qu’elle s’exprime dans son corps » (Gaskin, 2012).
De plus, l’accouchement est un acte sexuel qui met en jeux les mêmes hormones qu’un acte d’amour. Lorsque la femme baigne dans une atmosphère d’amour, de tendresse et de sérénité, l’ocytocine se libère à foison, ce qui rend le travail très efficace. Si la femme en ressent le besoin, il ne faut pas hésiter à passer son temps dans les bras de son conjoint, à l’embrasser, l’enlacer, à recevoir caresses et massages durant l’accouchement. Il arrive aussi que la femme ait besoin d’aucun contact physique, juste de tranquillité et d’indépendance. Les besoins de cet ordre peuvent donc varier d’une femme à l’autre.
La physiologie du post-partum
Pour Michel Odent (1990), la physiologie se poursuit même après la naissance. Elle est essentielle pour construire le lien d’attachement entre la mère et son bébé, et favoriser l’allaitement.
Le respect de la bulle MÈRE-Bébé
Tout d’abord, on retrouve un pic immense de libération d’ocytocine dans l’heure suivant la naissance, et se déroulant le plus souvent lors du premier contact entre une mère et son bébé. C’est l’hormone de l’amour et de l’attachement en plus d’être celle de l’accouchement, de l’allaitement et de l’acte sexuel (M. Odent, 1990). Ce pic d’ocytocine post-natal va entraîner un véritable tomber amoureux entre la mère et son bébé, si les conditions le permettent.
D’après l’OMS, où que l’enfant naisse, il est important que le bébé reste avec sa mère 24 heures sur 24 et de « préférence dans le même lit et dans une pièce chaude (au moins 25°) » afin de le garder au chaud, de l’allaiter à la demande et pour que se tisse l’attachement mère-bébé.
Ainsi, le peau à peau direct à la naissance du bébé pendant plusieurs heures (voire jours et semaines) est indispensable. L’absence d’interactions, de dérangement de la bulle mère-bébé est aussi primordial, lorsqu’il n’y a aucune complication le requérant. Il faudrait aussi repousser au lendemain tous les soins inutiles, qui sont, pour Michel Odent, une vraie violence faite au bébé : pesée, mesure, test Apgar, injections de vitamines, aspiration, gouttes dans les yeux, toilette, habillement, etc.
Il est aussi préférable de laisser le bébé avec son vernix pendant plusieurs jours après la naissance. D’après l’OMS, le vernix caseosa est un film protégeant le bébé des infections cutanées, favorisant la fonction barrière de la peau, hydratant et nettoyant, et très utile pour permettre l’instauration du « manteau cutané acide » favorable au microbiome. De plus, il le protège des chutes thermiques. Donner le bain ou peser son bébé suite à sa naissance entraîne un fort risque de chute de température. La place du bébé est donc en peau à peau contre sa mère (ou à défaut, son père) le plus longtemps possible. Si des pratiques culturelles exigent que le bébé soit lavé, l’OMS recommande de ne pas donner de bain avant grand minimum 6 heures suite à la naissance (OMS).
Les visites à la maternité ou à la maison sont aussi à limiter fortement les jours suivants la naissance. Elles peuvent venir perturber les nouveaux nés qui peuvent être très stressés. Cela peut même entraîner des problèmes d’allaitement, et bouleverser aussi les mères. La mère et son bébé sont deux mammifères qui ont besoin de l’odeur de chacun, ont besoin d’espace pour se découvrir et pour mettre en place leur allaitement tranquillement. Lorsque cela est possible, il est préférable que bébé reste le plus possible contre sa maman et contre son papa en peau à peau, en portage, en cododo, durant des jours, voire des semaines après l’accouchement. Cette proximité, en plus d’être totalement naturelle et essentielle pour l’attachement mère-bébé, viendra aussi stimuler la lactation. Notez que l’OMS recommande le cododo pendant au moins les 6 premiers mois de l’enfant (attention de respecter les règles de sécurité).
La délivrance du placenta
La délivrance du placenta se fait en général dans les 30 minutes après l’expulsion du bébé. Pour que son expulsion soit efficace, il est important de placer le bébé en peau à peau contre sa mère et de le couvrir d’une couverture. Encore une fois, l’atmosphère doit rester intime pour ne pas perturber la rencontre mère-bébé, leur tomber amoureux qui est alors associé à une délivrance rapide et efficace du placenta. Pour que la physiologie soit respectée, aucun autre acte n’est pratiqué. Si le placenta s’est détaché, mais na pas encore été expulsé, la mère peut se placer en position verticale qui facilitera sa descente (Gaskin, 2012).
D’après la Leche League, l’expulsion du placenta entraîne la chute du taux de progestérone, qui « déclenche l’arrivée du lait en abondance (la «montée de lait ») vers le troisième jour« .
L’allaitement
Allaiter son nouveau-né est normalement la suite logique d’une naissance. Allaiter est physiologique, naturel, c’est la norme biologique de notre espèce. Bon nombre de mères qui ne souhaitaient pas allaiter l’ont finalement fait instinctivement à la naissance, et ont poursuivit l’aventure.
Ainsi, avant la montée de lait, on retrouve la présence de colostrum qui est un concentré d’anticorps. Il protège contre les bactéries, les virus et autres corps étrangers. Il protège les muqueuses fragiles de l’intestin du nouveau-né et va les renforcer. D’après Michel Odent (1990) « le colostrum des premières heures contient des millions de cellules à action immunitaire par millimètre cube« . Elles sont capables d’éliminer les germes les plus redoutables. Le colostrum est aussi riche en acides gras polyinsaturés à longues chaînes, essentiels pour le développement du cerveau notamment. Ainsi, lorsque la physiologie de l’accouchement et celle du post-partum sont respectées, lorsque les besoins de la mère et du nouveau né le sont également (peau à peau, intimité totale, chaleur, absence d’intrusion….), le bébé trouve le mamelon dans les 30 à 45 minutes suivant sa naissance. Je souhaite insister sur cette phrase : « le bébé trouve le sein » et non pas « nous mettons le bébé au sein ». Lors d’une naissance physiologique ET respectée, le bébé et la mère sont deux êtres aux potentialités instinctives immenses (M. Odent, 1990). Lors d’une naissance à la maison, par exemple, « la tétée dans l’heure suivant la naissance est la règle presque absolue » (M. Odent, 1990). La mère et son bébé coordonnent leurs mouvements, et le bébé va trouver le sein de lui-même, lorsqu’ils ne sont pas gênés.
Pour la Leche League (LLL), l’ocytocine est également l’hormone du maternage et de l’allaitement. Lors des contacts et soins du bébé (peau à peau, massage, câlins, portage, cododo, etc.) la mère et l’enfant reçoivent des montées d’ocytocine entraînant détente, sérénité, calme et bien-être chez chacun. L’ocytocine « est un médiateur des expériences émotionnelles dans les relations proches » (LLL). De plus, au cours de la tétée, l’ocytocine stimule l’excrétion du lait, appelé aussi le réflexe d’éjection, « en favorisant la contraction des cellules myoépithéliales qui entourent les alvéoles des glandes mammaires » source). D’après la LLL, « le réflexe d’éjection du lait, contrôlé par l’ocytocine, permet le transfert du lait vers le bébé. Il est diminué par le stress, la douleur, les émotions négatives, la consommation d’alcool, de tabac. Par contre, le contact peau à peau après la naissance augmente la libération d’ocytocine, surtout si le bébé avec sa main vient stimuler le mamelon de sa mère« , et les premières tétées. Créer une atmosphère intime et de détente est donc partie intégrante de la physiologie du post-partum.
Pour finir, je vous partage un extrait du livre de Michel Odent (1990) au sujet des bébés nés de façon physiologique et respectée :
« La naissance à la maison m’a donné l’occasion d’observer une nouvelle espèce de bébé : des bébés qui , à l’âge de trois heures, ont déjà passé deux heures à téter vigoureusement ; des bébés qui gardent un contact peau à peau avec leur mère, jour et nuit, dans un lieu familier. Parmi eux, un sur trois ne perd pas du tout de poids et le poids initial est largement dépassé à l’âge d’une semaine. Ces bébés nous apprennent que la perte de poids n’est pas obligatoire. Peut-être même n’est-elle pas physiologique, même si elle a été la règle, probablement, dans la plupart des cultures humaines ».
Pour conclure, nous avons vu qu’il existe deux types d’accompagnement à la naissance : l’un physiologique et l’autre biomédical. Ce dernier est généralement le choix par défaut, par manque d’information et par manque drastique de transmission de femme en femme au sujet de la naissance physiologique. Nous avons aussi fait le tour d’horizon des grands besoins de base de la femme qui enfante, besoins devant être impérativement respectés pour que la physiologie de la naissance se déroule librement et sans complications.
Retenons que presque 90 % des femmes pourraient accoucher naturellement sans aucune intervention médicale si elles recevaient le soutien et l’environnement adéquat (source). Alors, à quand un véritable changement de nos pratiques?
Lorène.
Bibliographie
LIVRES :
Ina May Gaskin (2012). Le guide de la naissance naturelle : retrouver le pouvoir de son corps.
Ruth Ehrhardt (2015). The Basic Needs of a Woman in Labor.
Béatrice Jacques (2007). Sociologie de l’accouchement.
Michel Odent (1990). Le bébé est un mammifère
Maïtie Trélaun (2012). J’accouche bientôt, que faire de la douleur.
ARTICLES SCIENTIFIQUES :
Dockray, S. Steptoe, A. (2010) Positive affect and psychobiological processes. Neuroscience Biovehav Rev. 35(1), pages 69-75
Fredrickson, BL. (2001) The Role of Positive Emotions in Positive Psychology : The Broaden-and-Build Theory of Positive Emotionsm Psychol. March, 56(3), pages 218-226
Salovey, P., Rothman, AJ., Detweiler, JB. & Steward, W.T. (2000). Emotional States and Physical Health. American Psychologist. 55(1), pages 110-121
Steptoe, A. & Wardle, J. (2005). Positive affect and biological function in everyday life. Neurobiology Aging, 26(1), pages 108-112.
Tugade, MM., Frerickson, BL. Feldman Barett, L. (2004) Psychological Resilience and Positive Emotional Granularity : Examining the Benefits of Positive Emotions on Coping and Health. J Pers December, 72(6), 1161-1190
Vitetta, L., Anton, B., CORTIZO, F., Sali, A. (2005). Mind-Body Medicine. Stress and its Impact on Overall Health and Longevity. New York Academy of Sciences, 1057, pages 492-505
https://www.lllfrance.org/1145-59-comment-fabrique-t-on-du-lait
Merci et bravo pour cet article !!!
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