Physiologie : comprendre les besoins réels d’une femme qui accouche à travers la loi des sphincters

Avez-vous entendu parler de la loi des sphincters décrite par Ina May Gaskin, sage-femme américaine reconnue au niveau international ?

Connaître les principes de cette loi pourrait réellement transformer toute votre vision de l’accouchement, mais aussi votre perception du fonctionnement du corps de la femme qui accouche. Prendre conscience du processus physiologique d’un accouchement et des besoins d’une femme pour donner naissance, vous permettra d’accoucher naturellement plus aisément et en toute sérénité. Ce fût mon cas, il y a maintenant 16 mois. J’ai découvert toute la pensée de Gaskin à travers son livre La naissance naturelle. Cette lecture m’a transformée, et m’a donné une solide confiance en mes capacités à mettre au monde mon bébé, seule (sans aides externes médicales, mais avec le soutien de ma chère sage-femme). Accoucher chez moi est alors devenu une évidence. Mon récit se trouve ici.

Je vous laisse le plaisir de découvrir les besoins réels d’une femme qui accouche et les principes de cette loi des sphincters :

Michel Odent : pionnier français de la défense de l’accouchement physiologique

Tout d’abord, Michel Odent, chirurgien et obstétricien français est un pionnier dans la prise en charge des femmes enceintes et des accouchements. Il est fortement impliqué dans la lutte contre la surmédicalisation durant la grossesse, pendant l’accouchement mais aussi après, en post-partum. Il a développé les accouchements « comme à la maison », le peau à peau direct après la naissance sans interruption,  Il milite pour que la physiologie soit respectée dans toutes les phases de la naissance d’un enfant. Dans son livre « Le bébé est un mammifère », Michel Odent traite du besoin primordial d’intimité lors d’un accouchement. Pour lui, les conditions idéales d’un accouchement sont :

  • dans une pièce familière,
  • avec une lumière tamisée (le sens de la vue serait le plus intellectuel de nos sens et stimulerait le néocortex, qui inhiberait l’action du cerveau primitif crucial au déroulement de l’accouchement),
  • avec des personnes familières et de confiance,
  • avec un lit bas et confortable.

Clairement, c’est à l’opposé des salles de naissance en France (quoi que les salles natures se développent de plus en plus, victoire !). Pour Michel Odent, la longueur d’un accouchement est souvent en lien au nombre de personnes qui entourent la personne et au niveau d’intimité et de respect que la femme a.  Pour ce médecin, la physiologie se poursuit même après la naissance. Elle est essentielle pour construire le lien d’attachement entre la mère et son bébé, et favoriser l’allaitement. Ainsi, le peau à peau direct à la sortie du bébé pendant plusieurs heures est indispensable. Il faudrait aussi repousser au lendemain tous les soins inutiles, qui sont pour lui une vraie violence faite au bébé : pesée, mesure, test Apgar, injections de vitamines, aspiration, gouttes dans les yeux, toilette, habillement, etc.

Un environnement d’intimité est donc primordial lors d’un accouchement:

Pour Karine, sage-femme, les lieux d’accouchement courants, donc hospitaliers, sont clairement à l’opposé des besoins d’une femme pour accoucher, car ils sont vecteurs d’adrénaline (mon article sur les hormones clés de l’accouchement  se trouve ici). Bien heureusement, les femmes ont le choix, et peuvent s’orienter vers des environnements plus adaptés. Je vous parle des différentes possibilités de lieux d’accouchement propices à la physiologie dans cet article.

La loi des 3 P versus La loi des sphincters

D’après Gaskin, c’est donc la loi des sphincters qui prévaut lors d’un accouchement. Le monde médical, lui, ne suit pas cette loi, voire en ignore l’existence. Les obstétriciens se reposent plutôt sur la loi des 3 P:

  • Le Passager (le bébé),
  • Le Passage (le bassin et le vagin),
  • La Puissance (contractions).

Pour Ina May Gaskin, cette loi est à l’origine d’une méconnaissance et d’une incompréhension des capacités réelles du corps féminin. L’application de cette loi se traduit par les énormes taux d’interventions médicales en tout genre (épisiotomie, césarienne, forceps, ocytocine de synthèse…). Pour cette loi, si le travail de la femme n’aboutit pas en la naissance du bébé dans un temps imparti (temps différent entre chaque à hôpital…), c’est de « sa faute ». On lui dit alors qu’elle a conçu un bébé trop gros, que son bassin et vagin sont trop petits, qu’elle a un utérus trop faible, des contractions pas assez efficaces, etc.  Alors que d’après la loi des sphincters, « si un travail ne se conclut pas par un accouchement normal au terme d’une durée « raisonnable », c’est qu’il est ralenti ou entravé par le manque d’intimité, la peur et la stimulation d’une partie du cerveau qui n’est pas la bonne ».

Malheureusement le corps médical ignore souvent cette loi, elle ne leur a jamais été enseignée en faculté.

Pour Gaskin, c’est très clair : « un problème en relation avec l’un des trois P n’est pas la raison pour laquelle tant de femmes finissent par subir une intervention obstétricale  » -comme celles cités précédemment. C’est le non-respect de la loi des sphincters qui est une des causes les plus fréquentes.

De plus, la loi des 3P est fausse pour une très bonne raison : les taux d’interventions médicales varient énormément d’un hôpital à l’autre. Pourquoi dans certains hôpitaux le taux d’épisiotomie est de moins d’1%, alors que dans d’autres il est de plus de 50% ? Pareil pour les césariennes et toutes les autres interventions. Enfin, cette loi ne prend pas en compte des éléments essentiels : le caractère psychologique, l’aspect affectif et spirituel d’un accouchement.

Malheureusement, d’après Gaskin, cette loi est appliquée par des médecins et sage-femmes qui ont la croyance profonde que beaucoup de femmes sont nées avec une déficience qui les empêche d’accoucher sans intervention médicale. En réalité presque 90 % des femmes pourraient accoucher naturellement sans aucune intervention médicale si elles recevaient le soutien et l’environnement adéquat (source).

Les bases de la loi des sphincters de Gaskin 

Mais alors, en quoi consiste cette loi des sphincters ?

  • « Les sphincters cervical, vaginal et excrétoire (du col de l’utérus, de la vessie et du rectum) fonctionnent avec une plus grande efficacité dans une atmosphère d’intimité et de pudeur – par exemple, une salle de bains munie d’un verrou ou une chambre où une interruption est impossible ». Avez-vous déjà essayé de faire caca chez des amis et en plus la porte ouverte ? Hummm impossible pour la plupart d’entre nous, n’est-ce-pas ? Et bien il en est de même pour l’accouchement !
  • « Les sphincters ne peuvent pas s’ouvrir par la seule volonté et n’obéissent pas aux ordres (tels que Pousse ! ou Relâche!) » : ces ordres tellement fréquents à l’hôpital, sont donnés dans l’ignorance (ou surtout quand il y a un protocole rigide à respecter : pas plus de X heures pour accoucher) que la mère saura ELLE quand pousser grâce au merveilleux et puissant réflexe de poussée.
  • « Quand un sphincter est en train de s’ouvrir, il peut se refermer brusquement si la personne en question est contrariée, effrayée, humiliée ou gênée. Pourquoi? un taux élevé d’adrénaline dans le sang ne favorise pas (parfois même entrave réellement) l’ouverture du sphincters. Ce facteur inhibant est vécu par tous les mammifères lors d’un danger et d’une menace : le processus d’accouchement, s’arrête voire régresse pour permettre au mammifère de fuir afin de trouver un nouvel endroit plus sécurisé pour mettre bas. »
  • « L’état de relaxation de la bouche et des mâchoires est en corrélation directe avec la capacité des sphincters cervical, vaginal et anal à arriver à dilatation complète ». Laissez votre bouche et votre gorge souples, ne les crisper pas pendant l’accouchement. Les femmes détendues au niveau de la gorge et de la bouche n’ont généralement pas de déchirure. 
  • « Le rire facilite l’ouverture des sphincters » : éclater de rire quand on accouche est pour Gaskin une des forme d’anesthésies les plus efficaces car cela libère des endorphines, antidouleur puissant.
  • « Une respiration lente et profonde abdominale facilite l’ouverture des sphincters ». Elle induit une relaxation générale et plus particulièrement du plancher pelvien. Je vous en ai déjà parlé dans cet article consacré à mes conseils pour le jour J de votre accouchement.
  • « Prendre un bain chaud, ou une douche a un effet calmant et détend les sphincters ».

A ces principes, je rajouterais ces paroles tirées du livre de Ruth Ehrhardt (The Basic Needs of a Woman in Labor), sage-femme sud-africaine :

  • Entrer en travail est similaire au tomber dans le sommeil : les deux états ne peuvent pas être forcés ! Ils arrivent naturellement et parfois quand on l’attend le moins. On ne peut pas décider quand s’endormir ni quand entrer en travail d’accouchement. Par contre, on peut rendre difficile pour chacun de se dérouler facilement et efficacement. Le travail d’accouchement est comme le sommeil car nous avons besoin des mêmes conditions pour entrer dans ces deux états : nous avons besoin de nous sentir en sécurité, de chaleur, de relaxation.  Nous avons besoin d’être dans un environnement confortable, libre de toute pression, anxiété ou peur.
  • Pour que le travail soit efficace et que les sphincters fassent leur travail,  il ne faut pas déranger la femme :

-S’il y a une question à poser il est préférable qu’elle soit demandée au papa ou à la doula.

-Le monitoring continu est à proscrire en cas de grossesse normale, il est néfaste car dérange la femme et l’empêche d’être libre de ses mouvements.

-S’il y a un besoin de toucher vaginal, il est préférable de ne pas partager à la femme les détails de la dilatation et de la position du bébé. Cela dérange la femme, la sort de sa bulle (cortex archaïque) et la remet dans l’intellect et la raison (néocortex). C’est donc à l’opposé de ce qu’a besoin une femme pour accoucher. C’est ce que j’ai vécu et j’en suis très heureuse. Je n’ai appris ma dilatation que quand j’étais à 9 cm. J’ai pu rester tranquillement dans ma bulle sans être dérangée.

-Il faut éviter de proposer à la femme des antidouleurs (péridurale…). Si elle en veut, elle le demandera elle-même.

Au niveau physiologique et cérébral

Ainsi, physiologiquement, la fonction du sphincter est de se relâcher et de se dilater pour s’ouvrir facilement pour permettre d’évacuer ce qui doit sortir : évacuation (selles, urine) ou accouchement. Comme expliqué précédemment, Michel Odent a beaucoup travaillé sur les fonctions du cerveau impliquées dans l’accouchement. C’est le cerveau primitif et reptilien qui gouverne l’instinct et qui est donc clé dans la loi des sphincters. Il permet la libération des bonnes hormones, ocytocine et endorphines. La stimulation du néocortex, siège de la raison peut venir interférer avec le processus d’accouchement en inhibant les actions du cerveau primitif, qui ne libère alors plus les bonnes hormones.  Comment le néocortex est-il stimulé ? Et bien malheureusement c’est encore la norme dans la majorité des hôpitaux : lorsqu’on pose des questions à la femme faisant appel à la réflexion, en la dérangeant par des gestes intrusifs (touchers vaginaux répétés, monitoring, etc), lorsqu’elle baigne dans un environnement ne respectant pas son intimité (éclairage, personnels soignants inconnus…), etc.

Gaskin parle d’une étude intéressante qui a été réalisé sur des personnes parvenant à uriner chez eux devant un observateur. On a demandé à ces mêmes personnes d’uriner devant un observateur, mais à l’hôpital : la majorité n’y sont pas parvenus. Les femmes qui accouchent à l’hôpital sont malheureusement confrontées à ces mêmes facteurs d’inhibition. les sphincters sont réellement affectés par les émotions et l’environnement.

Pour conclure, retenons que les sphincters sont plus efficaces dans une atmosphère détendue et intime. Les sphincters acteurs durant le travail d’accouchement fonctionnement comme les autres sphincters : le travail, comme tout autre sphincter est un processus physiologique normal et à même de se dérouler positivement lorsque les conditions adéquates (intimité, respect de la bulle, respect de la femme et de son bébé, absence d’interruptions…) sont réunies. Tous les mammifères ont ce même processus physiologique en eux pour chacun de leurs sphincters, et ils l’accomplissent très bien depuis la nuit des temps. Nous faisons partie de ces mammifères. Nous savons donc très bien accoucher quand l’environnement est adéquat 🙂 !

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A très vite pour plus d’articles sur la naissance physiologique !

Lo.

Références :

4 commentaires sur « Physiologie : comprendre les besoins réels d’une femme qui accouche à travers la loi des sphincters »

  1. Lorène,

    Bravo pour ce nouvel article!

    J’ai besoin de toi!

    J’ai été bloquée sur FB à cause des illu de mon article sur l’HNI… Tu peux faire un post pour le dire sur le groupe du réseau ?

    Merci! ❤

    Bisous

    J’aime

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