La physiologie de l’accouchement…je vous en parle dans presque tous mes articles de maternité, mais je ne vous l’avais pas encore expliquée en profondeur. C’est ce que je vais donc faire à travers une série d’articles sur le sujet. Il y a tant à dire sur les mécanismes physiologiques de l’accouchement car tellement d’éléments entrent en jeu : le corporel, l’hormonal, le cognitif, l’émotionnel, l’affectif, l’environnemental,…
Lorsqu’on attend un bébé, il est essentiel de s’informer sur ce qu’il se passe en soi pendant la grossesse, puis sur ce qui ce qu’il passe en soi lors de l’accouchement, puis en post-partum. Cela permet de donner sens à ce qui nous arrive, de comprendre tous les chamboulements et ressentis corporels et mentaux, d’être rassurée sur la normalité de ce qu’il se passe en soi.
Avant toute chose, il faut garder à l’esprit que lorsqu’on parle d’accouchement, s’il y a bien deux éléments qui sont interconnectés ce sont le corps et l’esprit. Ils sont connectés constamment et interdépendant. L’esprit impacte le corps, et le corps a son impact sur l’esprit. Vous allez découvrir pourquoi précisément tout au long de mes différents articles sur la physiologie.
Un peu de mécanique
Les modifications physiques lors d’un accouchement sont les plus importantes que le corps humain connaisse. En effet, pour que quelque chose d’aussi gros passe par un trou aussi petit, il en faut des transformations corporelles ! Bien heureusement, le corps humain, et celui des autres mammifères, se modifient avec perfection pour la naissance, et la plupart du temps sans aucune aide, quand les conditions le permettent. Cela arrive tous les jours et depuis la nuit des temps.
Saviez vous que l’utérus est le muscle le plus puissant existant ? Il contient différents muscles dans tous les sens : longitudinaux, transverses, et obliques.
On peut observer sur l’utérus trois couches de fibres musculaires souples et puissantes. L’utérus va s’étirer tout au long de la grossesse pour accueillir le ou les bébé(s).
La contraction de ces muscles n’a lieu que sous l’influence de l’hormone de l’amour et de l’accouchement : l’ocytocine.
Avant la grossesse, l’utérus à la forme et taille d’une poire à l’envers, situé dans le bas ventre. Quand il y a grossesse, l’utérus grandit au fur et à mesure que le placenta et le bébé grandit. il atteint la taille d’une grosse pastèque lorsqu’il y a un seul bébé. En fin de grossesse l’utérus va jusqu’au delà des dernières côtes thoraciques et repousse l’estomac. Lors du travail, l’utérus pourtant très fin, a la capacité de pousser même un gros bébé à travers le col pour qu’il s’engage dans le vagin. Le vagin lui aussi s’étire et s’ouvre car il est très élastique et totalement conçu pour ça.

Le col de l’utérus – état normal (pas de grossesse) – source.
Lors d’une grossesse, l’utérus se compose d’une poche membraneuse, presque transparente, remplie d’un liquide salé (liquide amniotique) qui abrite le bébé et le cordon. Le cordon part du nombril du bébé et se rattache au placenta, organe vivant exceptionnel qui accomplit diverses fonctions qui seront remplacées, à la naissance, par celles du foie, des poumons, du système digestif, des organes excrétoires, et par les chambres cardiaques. Le placenta a un rôle vital dans la croissance du fœtus. Il nourrit donc l’enfant de multiples façons.
Le col de l’utérus, orifice circulaire, a une forme de goulot de bouteille. Il se trouve tout en bas de l’utérus avec un anneau musculaire puissant qui le maintien fermé jusqu’au travail. Il ressemble à un un petit sac, telle « une bourse fermé par un cordon » dit Ina May Gaskin, sage-femme. Ce muscle est très puissant puisqu’il maintient fermé l’utérus avec le poids d’environ 7 kilos du bébé et de la poche, et le placenta.

Le col de l’utérus et le bouchon muqueux – durant la grossesse– source.
Lorsque le travail commence ce muscle s’efface et s’ouvre. Le col de l’utérus est celé par un bouchon muqueux épais qui est expulsé généralement avant que le travail ne commence. Sa perte signifie que le début du travail est proche.
Les derniers jours de la grossesse les hormones prostaglandines ont pour effet de ramollir et raccourcir l’anneau musculaire du col pour le préparer au travail. C’est la maturation du col. Le col habituellement dur comme un bout de nez, devient mou au toucher lorsqu’il arrive à maturité.
Les différentes phases de l’accouchement
Vidéo en 3D qui montre bien le passage du bébé dans le bassin.
1. La dilatation du col ou travail

La dilatation du col – source.
La première phase de l’accouchement est la dilatation du col ou travail. Tous les mammifères restent très actifs durant cette phase de l’accouchement pour suivre et accompagner au mieux le chemin de bébé vers le canal de la naissance une fois le col dilaté complètement.
eT LA poche des eaux ?
La poche des eaux se perce parfois avant le travail, mais le plus souvent pendant. Cela arrive qu’elle soit intacte à la naissance et qu’il faille la percer et l’ouvrir pour que le bébé puisse prendre son premier souffle, mais cela reste rare.

La poche est parfois percée volontairement pour que le travail avance plus rapidement. Mais cela peut être dangereux quand le bébé est encore trop haut. Les sage-femmes savent normalement reconnaître le bon moment pour effectuer ce geste délicat (c’est ce que j’ai vécu, mon récit se trouve ici).
Des corps conçus pour s’adapter
La nature est parfaite. Saviez-vous que le crâne du bébé est conçu pour changer de forme pour justement passer plus facilement dans le bassin? Il s’adapte aux dimensions du bassin qui lui aussi est fait pour s’ouvrir pour le passage de bébé ! C’est pourquoi il est très rare qu’une femme ait réellement un bassin trop petit pour laisser passer son bébé (même si celui-ci est en siège), contrairement à ce que prône discours médical alarmiste en France et ailleurs. Enfin, le vagin lui aussi s’adapte très bien. Il a des tissus élastiques capables de s’écarter, s’étirer pour favoriser la sortie du bébé. Lorsqu’il est aidé de la gravité, cela minimise le risque de déchirure.
Les différentes phases du travail
L’étape de dilatation se décompose généralement en trois phases :
- La phase de latence, aussi appelée faux travail, est la phase de mise en route du travail. Les contractions sont d’abord irrégulières et peu douloureuses (comme des règles), puis elles deviennent régulières et plus intenses. Ces contractions irrégulières permettent au col de ramollir, raccourcir puis de s’ouvrir . Cette phase de latence peut durer quelques heures ; elle est généralement plus longue lors d’un premier accouchement.
- La phase active. Les contractions sont plus rapprochées, plus longues et plus douloureuses ou intenses (personnellement le mot douleur n’est pas adapté à mon vécu, alors qu’intensité oui).
- La phase de « désespérance » que certaines femmes uniquement vivent, pas toutes. Personnellement je ne l’ai pas vécu. J’étais tellement « shootée » aux hormones naturelles et dans ma bulle que j’ai vraiment vécu chaque moment de mon accouchement avec sérénité et sans aucune pensée. Pour les femmes qui la vivent, cette phase est la plus courte, mais elle peut être la plus difficile car les contractions laissent peu de répit à la maman. Le col arrive à dilatation complète et le bébé entame sa sortie.
Les différents Rythmes du travail
Pendant la phase de dilatation, les contractions rythmiques effacent et ouvrent le col. Le travail d’accouchement comporte des pauses entre les contractions. Ce sont des moments très importants du travail, puisque ces pauses permettent à la maman de se reposer, se relaxer et de récupérer. Ces temps de pauses peuvent durer 10-15 minutes en début de travail, puis plus qu’une minute ou deux jusqu’à la naissance.
Certaines femmes (comme moi) vivent ce qu’on appelle un plateau durant le travail. C’est un arrêt de progression du travail. Le col stagne généralement à 8 centimètres d’ouverture pendant plusieurs heures. Pour moi le plateau a duré 2h30-3h, je n’avais presque plus de contractions, bébé était dans le bassin et le travail a cessé de progresser. Pour Karine, sage-femme blogueuse, un plateau dure souvent entre 4 et 12 heures. C’est malheureusement une des causes fréquentes de surmédicalisation et de non respect de la physiologie et du rythme naturel d’un accouchement : injection d’ocytocine de synthèse, césarienne, forceps… Ma sage-femme m’a clairement dit que si j’avais accouché à l’hôpital j’aurais eu la totale, voire une césarienne, alors que mon bébé allait parfaitement bien.
Pour Karine, il y a deux scénarios au plateau :
- D’abord le bébé peut être mal placé alors il ne progresse plus dans sa descente. Une des raisons de cela est souvent l’absence de positions physiologiques accompagnant la descente optimale du bébé, dès le début du travail.
- Ensuite, le plateau peut apparaître lorsque la femme qui accouche est très fatiguée par son long accouchement. Pour citer Karine, sage-femme :
« À l’accouchement donc, le corps priorise aussi ce qui lui semble le plus sécuritaire. Si par exemple il a fallu trente-six heures à l’utérus de la femme pour que son col se dilate à huit centimètres, il est tout à fait raisonnable que le corps priorise les avantages d’une longue sieste de quelques heures plutôt que les risques d’épuisement maternel ou fœtal de continuer d’accoucher ». Pour cette sage-femme, la meilleure solution est de laisser la femme se reposer et dormir, il n’y a aucune urgence tant que maman et bébé vont bien. Le corps a juste besoin de récupérer pour retrouver un équilibre.
2. L’expulsion du bébé
La deuxième phase du travail arrive lorsque le col est complètement dilaté (à 10 cm). Les contractions utérines et abdominales poussent le bébé à l’extérieur du corps. Cela s’appelle le réflexe de poussée. C’est un phénomène exceptionnel du corps humain et d’une puissance incroyable.
Personnellement, je l’ai trouvé extraordinaire à vivre. Il mêle différentes sensations : un soulagement énorme, du plaisir, de la douleur car ça tire les tissus, parfois ça peut brûler un peu ou piquer. C’est en tout cas un ressenti très positif lorsque les conditions le permettent et que la femme est pleinement détendue et « animale » (je reviendrai sur cet état animal dans des articles).
L’expulsion est très rapide et intense quand elle se déroule de façon physiologique. L’effet de pesanteur avantage énormément la progression du bébé vers l’expulsion. Il y a un risque moindre de déchirure si le bébé est expulsé en position physiologique : debout, assise, accroupie, sur le côté,… la position que votre instinct vous dicte et en fonction de comment est placé votre bébé.
3. La délivrance
La troisième phase de l’accouchement s’appelle la délivrance. Elle va de la naissance du bébé jusqu’à l’expulsion du placenta. L’utérus continue à se contracter après la naissance du bébé en se rétractant jusqu’à la taille du placenta. Les contractions (pour moi non douloureuses) détachent le placenta de la paroi utérine. Il y a expulsion de sang rouge foncé dans les 15 à 20 minutes suivant la naissance. Puis d’autres contractions expulsent le placenta, tout naturellement.
Dès sa sortie du ventre, il est primordial de placer bébé en peau à peau contre sa mère avec une couverture lui tenant bien chaud. Cela assure une continuité pour le bébé suite à sa naissance. De plus ce peau à peau favorise le lien d’attachement, le bon déroulement de l’allaitement et répond à son besoin primaire de contact et de chaleur. Cela permet le « tomber amoureux » entre la mère et son bébé. Ce moment d’intimité et les premières tétées favorisent en plus l’expulsion du placenta de part l’immense sécrétion d’ocytocine que cela induit.
Le corps en post-partum
1. Les tranchées
Les jours suivants l’accouchement les contractions utérines continuent dans le but de réduire l’utérus à sa taille initiale et d’éviter une trop grande perte de sang. Ces contractions s’appelles les tranchées. Lors des tétées, elles peuvent être plus fortes. Elles peuvent être douloureuses pour certaines femmes et indolores pour d’autres (je n’ai rien senti).
2. Les lochies
Pendant environ deux semaines minimum après l’accouchement une mère a des pertes de sang et de résidus de la grossesse plus ou moins importantes. Ce sont les lochies. Lors que le placenta se décroche, il laisse une plaie sur la paroi utérine. La mère perd alors du liquide lymphatique qui permet la cicatrisation de cette plaie, et du sang.
Après la première semaine, les saignements diminuent graduellement. Certaines femmes ont des pertes vaginales jusqu’à 6 semaines après l’accouchement.
3. La montée de lait
D’après la Leche League, lors de la naissance, l’expulsion du placenta entraîne la chute du taux de progestérone, qui « déclenche l’arrivée du lait en abondance (la «montée de lait ») vers le troisième jour. Le lait est sécrété continuellement au niveau des alvéoles où il est stocké jusqu’à la tétée. »
Avant la montée de lait, est sécrété un liquide appelé colostrum durant les premiers jours suivants la naissance (parfois même durant la grossesse).
Il est habituellement plus jaune et plus épais que le lait. D’après la Leche League, il a des « propriétés nutritionnelles, anti-infectieuses et autres, particulièrement bien adaptées aux besoins du nouveau-né, ce qui permet de le considérer comme de « l’or liquide ». Sa coloration jaune est en rapport avec son taux très élevé en bêta-carotène. Il contient un concentré d’anticorps, plein de vitamines (K, A, E, B12,….), des minéraux essentiels (sodium, potassium, chlore, cuivre, zinc), des immunomodulateurs (stimule le système immunitaire immature du nourrisson), des cellules vivantes (leucocytes, cellules épithéliales, …) qui protège les muqueuses intestines. Pour la Leche League : « Son taux élevé de facteurs immunocompétents protège l’enfant pendant la période où il doit passer de la vie intra-utérine en milieu stérile à la vie extra-utérine et à la colonisation microbienne. Ses propriétés laxatives favorisent l’élimination du méconium (premières selles du bébé). Sa richesse en protéines et son taux bas de lipides est adapté aux réserves nutritionnelles du nouveau-né. Il favorise la stabilisation de la glycémie. Il a d’importantes capacités anti-oxydantes, […].
Ensuite, la production du lait est régulée par la prolactine, hormone naturelle, « qui crée un climat hormonal propice à la fabrication du lait, et l’ocytocine qui fait travailler les muscles pour faire sortir le lait dans la bouche du bébé » (LLL). Elle est responsable de la livraison du lait. C’est la succion efficace du mamelon qui fait sécréter ces hormones. S’il n’y a pas cette extraction du lait par le bébé ou par un tire-lait, il n’y aura pas production de lait en quantité suffisante pour nourrir le bébé et la glande mammaire va disparaître petit à petit. Il faut bien gardez à l’esprit que succion = lactation. L’allaitement se fait donc uniquement à la demande. Si vous souhaitez connaître des informations essentielles sur l’allaitement, je vous invite à lire cet article.
A très vite,
Lorène.
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RÉFÉRENCES:
https://www.lllfrance.org/1145-59-comment-fabrique-t-on-du-lait
Un article super complet et très intéressant !
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Je ne suis pas enceinte et n’ai pas prévu pour l’instant d’avoir un enfant.
Mais ce genre d’article me rassure. J’ai une forte angoisse à l’idée d’être enceinte et surtout d’accoucher. Mais ces articles, et plus généralement ce blog m’aide à dompter cette peur pour pouvoir peut être un jour avoir un bébé ♥
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❤ merci pour ce commentaire 😀 C'est jutement le but de ma démarche : informer, rassurer, faire évoluer les croyances autour de la naissance, apaiser l'angoisse ! A très vite
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Article très complet et que de belles références! 😉
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